Titre en ce temps là (4154 octects)
 

Un article de LOUIS DUCOMBEAU

1705.
L'église Saint-Thomas de Figeac: une cure convoitée

A Figeac, l'église paroissiale Saint-Thomas devient subitement le théâtre d'une controverse, après le décès du curé en exercice. Quatre prêtres revendiquent la succession de cette charge spirituelle et matérielle. Il faudra même faire appel à Rome pour trancher le différent...

cath_2.jpg (8959 octets)A la suite du décès, en janvier 1705, de Joseph Dumont curé de l'église paroissiale Saint-Thomas, Pierre Falret prêtre du diocèse de Cahors, malgré le refus du patron (1), l'abbé de Figeac, obtient de l'évêque de Cahors, le 9 février, visa et institution pour ce bénéfice (2).

Le 11 février, avant midi, accompagné du notaire royal apostolique Raymond Delbourg, il se présente devant la porte principale de cet édifice afin d'observer les formalités requises (onction d'eau bénite, sonnerie de cloche, prières à genoux devant le grand autel) pour être mis, en présence de témoins et sans opposition "en l'actuelle, réelle et corporelle possession de ladite église paroissiale".

Prise de bec dans l'église!

Cet acte officiel suscite la vigoureuse opposition d'un autre ecclésiastique pourvu également de cette charge et déjà en place. Le 1er mars à 8h du matin Pierre Falret, toujours accompagné du notaire Delbourg, se rend à Saint-Thomas pour signifier au contestataire Jacques Lagane curé de Vic et aux paroissiens assemblés pour entendre la messe, qu'il est seul canoniquement en droit de faire les fonctions curiales et somme son confrère de lui délivrer les clefs et les ornements nécessaires pour accomplir ce ministère.

A ces injonctions Jacques Lagane répond d'un ton hautain: "rien n'est à vous; une petite mouche ne doit pas s'élever contre un éléphant" puis donne lecture, lui aussi, de sa lettre de nomination et affirme vouloir poursuivre son sacerdoce dans ce lieu.

Peu impressionné Pierre Falret réitère ses propos au grand dam de son homologue qui, très en colère, perd son sang froid et s'écrie en se tournant vers les fidèles réunis pour participer à l'office "justice mes paroissiens, on veut m'empêcher de faire les fonctions curiales". Tous ces propos "causent un grand émoi, font un grand bruit et obligent une partie de l'assistance à sortir".

Le requérant "pour éviter un plus grand désordre et empêcher un débordement scandaleux" préfère se retirer.

C'est le pape qui tranche...

Naturellement une instance de "complainte sur le possessoire" de cette cure ou vicairie perpétuelle est formée devant le sénéchal de Figeac par les deux protagonistes auxquels, surprise, viennent s'ajouter François Boutaric et Pierre Ducroze, pourvus également disent-ils de ce bénéfice.

Quatre c'est beaucoup et par sentence contradictoire du 27 janvier 1707 les magistrats attribuent la charge à Jacques Lagane. Bien entendu ce jugement ne convient pas à Pierre Falret. Il fait appel auprès du Parlement de Toulouse. Comme souvent dans les litiges, par l'entremise d'amis communs, afin d'éviter les frais d'un long procès et continuer à vivre dans l'harmonie convenable à leur état. Un arrangement entre les deux parties est conclu le 19 février 1707.

Pierre Falret, pour cause de permutation canonique, cède et remet en faveur de Jacques Lagane, entre les mains du pape, tous les droits qu'il peut avoir sur la cure ou vicairie perpétuelle de Saint Thomas en échange de ceux de l'église paroissiale Saint-Etienne et Saint-Blaise de Vic et de la chapellenie de Cruzols fondée et desserviable dans l'église du couvent des frères de l'ordre Saint-Dominique de Figeac possédés par Jacques Lagane. N'intervient dans cet accord "aucun dol, fraude, simonie ou convention de droit réprouvé", assurent les protagonistes.

Finalement le 10 janvier 1709 Pierre Falret, après avoir obtenu "signature en cour de Rome, visa et institution canonique de l'évêque de Cahors" est mis en possession du bénéfice convenu et Jacques Lagane enfin reconnu par tous les paroissiens de Saint-Thomas comme leur pasteur.

Cet imbroglio, résultat peut être d'un certain esprit d'indépendance, de quelques négligences et d'une trop grande prise en compte de recommandations, impensable de nos jours, ne doit surtout pas voiler les actes de vertu et œuvres de charité bien éloignés des préoccupations vulgaires.

(1) patron: prélat ou laïque qui nomme à un bénéfice.
(2) bénéfice: charge spirituelle accompagnée d'un certain revenu.


Louis Ducombeau - Sources: A.D. 46.


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Sources : Archives Départementales du Lot
Publié avec l'aimable autorisation de
La Vie Quercynoise

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